Génération Y versus vieux monde…

economie solidaireL’Institut Ipsos, BCG (Boston Consulting Group) et la CGE (Conférence des grandes écoles) viennent de révéler les données d’une étude (1) menée conjointement sur 3 224 étudiants et alumni sondés issus des grandes écoles.

Quelques chiffres issus de l’étude, assez révélateurs concernant cette Génération Y :
66% adhérent à l’idée qu’un «travail utile est un travail qui sert l’intérêt général».
53% se déclarent vouloir «mettre leur vie professionnelle au service des autres».
84% déclarent que «l’ambiance et le bien-être au travail» jouent aussi pour beaucoup pour s’engager professionnellement.
75% considèrent qu’il est «primordial de mener une carrière en phase avec ses valeurs».
61% juge que «la rémunération n’est pas un critère décisif dans le choix de leur futur métier» (en 10e position sur les 16 critères proposés).
25% se disent «prêt à gagner moins pour travailler dans l’économie sociale et solidaire».

Une tendance forte : les étudiants recherchent dorénavant un métier qui fait sens.

Globalement, la jeunesse des grandes écoles françaises aspire au «travail-valeurs» ; 52% pour le social, 50% pour l’éducation, 62% pour l’environnement. Pour un «travail idéal», 1 jeune sur 5 choisirait de travailler dans une ONG. Changement de paradigme donc, car ce sont donc ces nouvelles aspirations vers les secteurs de l’ESS (économie sociale et solidaire), l’économie du partage, l’économie collaborative et autres initiatives associatives porteuses de projets collectifs qui interpellent le plus cette nouvelle génération. En effet, la Génération Y souhaite avant tout «s’épanouir grâce à un emploi qui soit intellectuellement et humainement stimulant» – 88% ! Les valeurs changent et l’argent n’est plus LA priorité. On observe que chez les deux plus grandes écoles de commerce françaises – HEC et l’ESSEC – les spécialités business les plus plébiscitées par les étudiants sont les modules d’Economie collaborative. Rien que ça.

Selon les études, les femmes ont plus d’appétence pour le secteur de l’ESS que les hommes. 61% d’entre elles souhaitent travailler dans l’ESS (contre «seulement» 45% des garçons). Sur le principe qui prévaut dans l’ESS «une voix-une personne», 56% des filles se disent proches du concept d’entreprise démocratique (46% pour les hommes). PGE – «Programme Grande Ecole» ou «Power Girl Empathy» ?

Il n’y a pas que le compte en banque et la gloire dans la vie… Cette jeunesse estime qu’on ne peut pas s’en sortir dans la vie sans solidarité. On savait déjà que l’histoire d’amour «ESS + Génération Y = engagement» était un phénomène durable et solide. 75% des jeunes de 16 à 30 ans adhéraient déjà aux valeurs de l’économie sociale et solidaire selon une étude de l’Institut CSA (juin 2011). Pas altruiste la jeunesse ? 80% des 18-25 ans sont favorables à un service civique obligatoire (enquête “Génération quoi ?” / France Télévisions / 2013).

On note que la tendance est un peu moins forte (mais en hausse notable) dans les écoles de management et de commerce. En interrogeant les étudiants, on s’aperçoit que c’est principalement une grande méconnaissance et le manque d’informations du secteur de l’ESS qui freinent encore les étudiants à s’engager dans cette voie. Il faut dire aussi que l’ESS – 12% des emplois en France (!) et secteur qui résiste le mieux à la crise – est parfois un domaine carrément ignoré ou balayé dans les programmes de certaines écoles. Etrange déni lorsqu’on mesure à quel point l’ESS est un secteur qui pourrait répondre aux attentes de nombreux étudiants potentiels. Quel dommage que celles-ci n’observent pas le phénomène de plus près avec la loupe «marché».

Le 25 janvier dernier sur ce blog (2), j’écrivais mon enthousiasme pour cette jeunesse avec ces mots : «Cette jeunesse, elle, a changé ! Elle n’est pas toujours «sacrifiée» ou «désabusée», loin de là ! Je suis au côté de mes étudiants de vingt ans, tous les jours, et je vous affirme qu’ils sont de plus en plus nombreux à vouloir agir pour construire leur monde de demain ; ils sont positifs, optimistes, et ils innovent !  Ils sont de plus en plus nombreux à vouloir privilégier la quête de sens et l’utilité sociale sur le montant du salaire. Ils sont de plus en plus nombreux à se mobiliser pour façonner une économie du partage, plus collaborative et plus respectueuse de l’environnement. Mes étudiants en commerce sont de plus nombreux et sensibles aux principes de l’économie sociale et solidaire. Elle est comme ça cette jeunesse, elle dispose de nouveaux supers-pouvoirs : ces digital-natives, issus de l’ère du web 2.0, forment des communautés d’intérêts via les réseaux sociaux, elle fabrique de l’intelligence collective via le gaming en ligne, elle élabore des solutions en mode Do It Yourself… Et bien moi, mes étudiants m’inspirent. Et je suis persuadé qu’ils feront mieux que nous. En fait, ils sont même en avance sur l’école.
Les grincheux proclament que cette jeunesse n’est pas empathique ? 3,3 millions de bénévoles en France ont entre 15 et 35 ans. Ils représentent 26% du nombre total des bénévoles / avec + 32% entre 2010 et 2013 ! (Source : France-Bénévolat, juin 2013) ».

Puis j’ajoutais pour contextualiser les changements opérés dans le management en entreprise : « Car depuis quelques années, on voit apparaître une nouvelle génération de managers, désireux de changer leur entreprise de l’intérieur, en quête de sens et créant d’innovants business models ».

Alors, faut-il « réussir dans la vie » ou réussir sa vie ?

Maxime Beaulieu

(1) http://www.ipsos.fr/decrypter-societe/2016-01-25-qu-est-ce-que-jeunes-grandes-ecoles-attendent-leur-emploi
(2) Lire l’article «L’Ecole de demain – partie 2» : https://maximebeaulieublog.wordpress.com/2016/01/25/lecole-de-demain-22/

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